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Parabole du failli


Alors qu’il semble enfin devoir connaître le succès, Pedro, un jeune comédien haïtien en tournée à l’étranger, se jette du douzième étage d’un immeuble. Dans son pays natal, l’un des deux amis avec lesquels il partageait au hasard des nuits un modeste appartement aux allures de bateau-ivre tente alors, entre colère et amour, de comprendre les raisons de ce geste, au fil d’une virulente adresse au disparu, comme pour remplir de son propre cri le vide laissé par celui qui déclamait dans les rues de Port-au-Prince les vers de Baudelaire, Éluard ou Pessoa, faute de croire aux poèmes que lui-même écrivait en secret et qu’il avait rassemblés sous le titre : “Parabole du failli”.

Un homme est tombé, qui n’avait pas trouvé sa place dans le monde d’intense désamour qui peut être le nôtre : dans l’abîme que crée sa disparition s’inscrit l’échec du suicidé mais aussi de celui qui reste, avec sa douleur et ses discours impuissants. À travers ce portrait d’un homme que le terrifiant mélange du social et de l’intime a, de l’enfance au plongeon dans le vide, transformé en plaie ouverte au point de le contraindre, pour être lui-même, à devenir tous les autres sur la scène comme dans la vie, Lyonel Trouillot, dans cette nouvelle et bouleversante “chanson du mal-aimé”, rend hommage à l’humanité du désespoir, à l’échec des mots qui voudraient le dire mais qui, même dans la langue du Poète, ne parviennent jamais à combler la faille qui sépare la lettre de la réalité de la vie.


«Sur le mode d’une instruction à charge, j’ai voulu, en retraçant le parcours d’un suicidé, interroger la / notre “méchanceté ordinaire”. Y a-t-il un fond d’incommunicabilité qui fait de l’appel (à l’amour, au partage poétique du monde) un appel manqué ? Il s’agissait, à travers la destinée d’un individu, de rendre compte de l’impuissance du langage (poétique et quotidien) face aux structures sociales et caractérielles qui font que nous pouvons, comme par inadvertance, regarder l’autre passer sa vie à mourir, et, de fait, mourir. Quels sont les pouvoirs et manifestations de la détestation telle qu’elle s’oppose au don de soi, de l’indifférence telle qu’elle s’oppose à l’empathie, du désamour tel qu’il s’oppose à la main tendue ?
Pedro, instable et multiple, traverse la ville et une (anti)carrière de comédien en offrant au tout-venant ou à des femmes aussi idéalisées que réelles, les mots des poètes. Il cache que luimême écrit et partage une partie des dernières années de sa vie avec deux amis, l’Estropié et le narrateur. Ils sont ceux qui le connaissent le mieux, mais lui les connaît mal. Ils ne lui ont jamais fait de confidences sur leurs drames intérieurs, alors que lui promène partout les siens. Ce jeu du silence et de la prise de parole interroge les vertus du langage et sa capacité à inspirer aussi bien la confiance que la perte de confiance.
Ce ne sont pas la vie et la mort de Pedro qui sont racontées, mais, de préférence, des discours qui se tissent pour former un cri dont le narrateur sait qu’il ne parviendra jamais à reproduire celui du disparu.
Le livre porte le titre d’un modeste ensemble poétique laissé inédit par Pedro qui l’a dédié à une femme qu’il ne nomme pas. La Parabole du failli est double : au tragique échec de celui qui citait les poètes et cachait ses écrits répond celui du narrateur qui sait n’avoir pas su rendre sa force au cri de l’ami défunt et n’avoir pas répondu à la question qui l’obsède : pourquoi et de quoi le langage ne peut-il convaincre ?»

L.T.

août, 2013
11.50 x 21.70 cm
192 pages


ISBN : 978-2-330-02262-4
Prix indicatif : 20.00€



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Ce livre existe également en version numérique
Prix Carbet de la Caraïbe et du Tout-Monde -

Une nouvelle fois, Lyonel Trouillot explore les failles de l'âme humaine. Et les vertus du seul antidote au desespoiur qui vaille : la poésie.

Victoria Gairin, Le Point.fr

Une magnifique histoire d'amitié. (...) On retrouve dans Parabole du failli le talent de Lyonel Trouillot à composer des personnages qui, par eux-mêmes, par leur histoire, soutiennent une narration (...) une force d'émotion éblouissante.

Christophe Kantcheff, Politis

Un miroir tendu aux pays dits "en développement", avec une plume dont la lucidité et la maîtrise impressionnent.

Hubert Proglongeau, Le Magazine littéraire

Parler à un mort. Pour lui demander pardon de n'avoir rien pu faire, pour l'assurer qu'on l'aime toujours, pour comprendre pourquoi il s'est jeté par la fenêtre d'un douzième étage. Tel est le propos, lyrique et grave, de Parabole du failli.

Certaines failles ne se comblent jamais, mais les mots peuvent donner à ceux qui y tombent leur place parmi les hommes.

Alain Nicolas , L'Humanité

Écrire la Vie majuscule, en transcrire le mouvement, la spontanéité, la beauté hasardeuse, malgré un matériau qui fixe fatalement l'évanescence du monde.

Il dit écrire avec "les mots des autres", ceux entendus au coin de la rue, assis au fond d'un bar ou sur les banquettes râpées d'un tap-tap. Sa force est de les rassembler dans un style spiralique et baroque, où s'entremêlent roman, poésie et théâtre.

Emile Rabaté, Libération

La Parabole du failli, c'est un peu tout cela, ce que l'on a vu et ce que l'on n'a pas dit, ce l'on n'arrivera ni à dire ni à écrire

Parabole du failli est un texte beau et glissant, incertain, dont l'inaboutissement, l'échec, est une formidable réussite.

Un homme est tombé du douzième étage, et l'onde de choc n'a pas fini de se propager. Elle touche jusqu'au lecteur.

Nils Ahl, Le Monde des Livres

L'incommunicabilité, la défaite des mots, l'échec du langage hantent ces pages tourmentées où brillent dans la pénombre les récits de débâcles comme autant de diamants noirs.

Corinne Renou-Nativel, La Croix

L'écriture de Lyonel Trouillot se fait sensible derrière la drôlerie, tendre en dépit de la douleur, jubilatoire malgré l'échec.

Panorama